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Des chiffres impressionnants
Alors, c’est déjà fini. Trois petits tours et puis, s’en vont. TEFAF 2024 s’est terminée dans l’euphorie : beaucoup de visiteurs, beaucoup de ventes. Galéristes et organisateurs sont contents, et, pour autant que j’aie pu en juger, les visiteurs aussi.
Pour ma part, j’ai la sensation d’avoir visité un nombre incalculable de stands, et pourtant, je n’en ai vu qu’une parcelle. Par conséquent, les impressions que je vais partager avec vous sont subjectives et partielles.
Quelques chiffres : pas loin de 50.000 visiteurs, pour 270 galeries, venant de 22 pays, ltoute la foire embrassant quelques 7000 ans d’histoire. La foire a reçu la visite de 300 directeurs de musée, et du double de conservateurs, plus celle du bon nombre de mécènes. Les ventes sont montées jusqu’à 7 chiffres. Beaucoup d’objets sont partis dès le premier jour, réservé aux représentants de musée et autres acheteurs importants.
Alors, qu’est-ce qui m’a frappée, moi, qu’est-ce qui m’a plu? Je vous donne mes impressions plus ou en moins en vrac.
Tout d’abord, chez Weiss, ces portraits du père et de la fille, Henri IV et sa cadette, Henriette-Marie, tous deux peints par le Flamand Frans Pourbus II, dit Le Jeune (1569-1622). Qui connaît leur histoire (voir les détails ici), se dit en regardant ces portraits: quelles destinées… magnifiques et tragiques.
Mais ici, dans ces tableaux, on voit un père souriant, et une petite fille éveillée qui semble avoir confiance dans l’avenir. Plus tard, elle sera peinte de nombreuses fois, notamment par Sir Anthony Van Dyck. Ce sont des portraits d’apparats, beaux mais bien plus impersonnels que celui-ci.
Les femmes, toujours
Comme le premier jour de cette édition du TEFAF a coïncidé avec la Journée Internationale des droits des femmes, tou(te)s les galéristes, ou presque, se sont mis en quatre pour dénicher des femmes artistes à exposer dans leur stand. Certain(e)s y ont particulièrement bien réussi, comme la galerie napolitaine Porcini, qui avait accroché quatre tableaux faits par des femmes (du XVIIe siècle, s’il vous plaît !), dont « Judith avec la tête d’Holofernes » d’Elisabetta Sirani (Bologna 1638-1665). Elles en étaient bien fières, Ivana Porcini et ses collègues, parce que, m’ont-elles dit, les femmes qui arrivaient à s’établir comme peintres étaient quand même une petite minorité aux temps où elles n’avaient d’accès à une formation et un atelier que lorsqu’elles avaient un parent peintre – ou très fortuné et ouvert d’esprit.
Hommage aussi à la galerie Rob Smeets de Genève, dont tous les panneaux s’ornaient d’oeuvres de femmes. Paul Smeets, fils et successeur du fondateur, s’est fait un plaisir de me donner des explications. Tout d’abord sur Giovanna Garzoni (Ascoli Piceno 1600 – Rome 1670), une des très grandes dames de la peinture en son temps – tout comme, aux Pays-Bas, Michaelina Wautier ou Rachel Ruysch, d’ailleurs, et, plus tard en Italie, Angelica Kaufmann. Garzoni, qui a travaillé pour les grandes cours d’Italie (et sans doute ailleurs en Europe), avait fait des natures mortes sa spécialité, et de la tempera sa technique préférée pour ce genre de sujet – bien qu’elle ait fait aussi des portraits et même des représentations religieuses.
Puis, Paul Smeets, s’est arrêté devant le fort curieux « Portrait d’Antonietta Gonzales » de Lavinia Fontana (1542-1614). C’est un portrait, à la fois repoussant et attendrissant, d’une petite fille souriante qui serait toute mignonne si son visage n’était couvert de poils. On se demande si on regarde une enfant ou un petit chat… Antonietta, atteint d’hypertrichomie ( surabondance de pilosité), tient à la main un papier manuscrit qui résume son histoire.
Cliquez ici pour en savoir plus.
Autre grande dame de la peinture au XVIIe siècle, hollandaise cette fois-ci : Judith Leyster (1609-1660), élève du grand Frans Hals, et enfin présente dans la Galerie d’honneur du Rijksmuseum. La galerie Solomon Lilian a présenté son « Garçon tenant une grappe de raisin dans son chapeau » (un moment attribué à son mari, Jan Miense Molenaer, un peintre de bien moindre envergure que Leyster) . Beau tableau, d’un garçon souriant, comme Hals, lui aussi, en représentait souvent.
Mais je dois faire une confession : j’étais tellement obnubilée par le « Portrait d’un homme de cinquante ans » (1635) de Frans Hals lui-même, dans la même galerie Solomon Lilian. Un Hals, en vente, vraiment ? Et mon obnubilation était aggravée du fait que, justement, il y a une formidable exposition Frans Hals au Rijksmuseum en ce moment). Si bien que… j’ai complètement oublié Leyster… Suis-je bête…! (Quant au Hals, aux dernières nouvelles, il n’était pas encore vendu… )
BLASÉ
Et puis, on continue son chemin de galerie en galerie, un beau Brueghel (Jan le jeune, 1601-1678) chez Laura de Jonckheere, ainsi qu’une copie de Bosch, un Roelant Savery (1578-1639) chez Florence de Voldère (il y a exposition intéressante des oeuvres de Savery – peintre à la cour de l’empereur Rodolphe II, à Prague – au Mauritshuis). À force, on devient un peu blasé… Tiens, encore un Brueghel, encore un Van de Velde…
FRÈRES ENNEMIS
Petit à petit, j’arrive chez les impressionnistes , néerlandais entre autres, ceux de l’École de la Haye. La galerie Albricht en a une floppée, incroyable. Je jette un coup d’oeil furtif pour voir si, comme l’année dernière, elle a aussi un Breitner (1857-1923), frère ennemi d’Isaac Israëls : d’abord amis, ils partageaient une maison à Amsterdam, du temps où Israëls habitait cette ville ; mais la compétition s’est avérée plus forte que l’amitié… Dommage – bien qu’ils aient fini par se raccomoder, sur le tard…. Dans le stand de la galerie, comme en 2023, voilà donc Isaac Israëls (1865-1934) et George Breitner faternellement côte à côte. Et égoïstement, je suis contente que ces tableaux ne soient pas vendus, ainsi je peux de nouveau les admirer…
Un autre Israëls attire mon attention : une scène au zoo de La Haye, un gardien avec des perroquets. Il me fait penser à un tableau de Max Liebermann, sur le même thème. Isaac Israëls a certainement connu le tableau de Liebermann, me confirme la galériste, il venait chez les Israëls, étant un ami du père, Jozef, lui aussi un peintre de talent. Mais ce gardien de zoo avec ses perroquets de toutes les couleurs était un thème chéri des peintres, Isaac Israëls l’a peint plusieurs fois, lui. C’est un tableau qui met de bonne humeur.
Chez le voisin, Bies, encore un Israëls, de sa période parisienne, « Jeune fille lisant aux Tuileries ».
Avant de sortir, je jette un coup d’oeil chez Perrin, pour m’assurer que la fascinante « Vue sur le Vésuve en éruption » (1805) de Simon Denis (1755-1813) – autre thème cher aux peintres, autrement plus dramatique que celui des perroquets – est toujours là. Elle l’est.
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TEFAF 2024 – 2 – LADIES FIRST, AGAIN
So it’s finished, TEFAF Maastricht 2024, all over, bye bye till next year (or till the fair in New York, in May). All-over figures : some 50,000 visitors, 270 galleries from 22 countries, 7000 years of history shown all over the place; among the visitors, some 300 museum directors, and way over 600 curators, as well as a number of sponsors. In short, many happy faces!
So what did I see, notice, like ? Impossible to see it all, so I’ll give you a very personal, limited view of the show. The first time, I limited myself mainly to modern and contemporary art ; at my second visit, I saw mainly old masters, let’s say paintings from the 17th till 19th and early 20th-century. That’d quite limited, but there’s a lot of it!
LADIES IN THE LEAD
What I first noticed, was – again – the relative importance of women painters. Not so surprising, as the fair started around 8 March, International Women’s Day. But in earlier centuries, these women are not always easy to find, as it was difficult for them, first to get schooled, and then, to establish themselves as artists. Mostly, these women had a father, an uncle or a brother in the trade, who gave them a lift, so to speak. But after that, they had to do it themselves – and some of them did remarkably well, like – of course – Artemisia Gentileschi and Angelica Kaufmann, whom we all know now, but all through the 17th and 18th century, there were quite a few of them : Lavinia Fontana (1542-1614), one of the very first women painters we know of, Giovanna Garzoni (Ascoli Piceno 1600 – Rome 1670), or Elisabetta Sirani (Bologna 1638-1665), all great artists, and much appreciated in their time, some even became teachers. In the Low Countries, you had, for instance, Michaelina Wautier (1604-1689) or Rachel Ruysch (1664-1750), or Catherina Knibbergen (1st work dated 1634), who all had succesful and long careers, but also Judith Leyster (1609-1660), one of Frans Hals’ pupils, who stopped painting professionally when she married, and whose work, after her death, was sometimes attributed to her husband, the minor artist Jan Miense Molenaer…
I liked the enthusiasm with which gallery owners told about « their » women artists. First, the Porcini ladies, so proud and happy they found four important works to show. Then, Sander van Bijl (Bijl-Van Urk) and Paul Smeets (Rob Smeets gallery), both kind of glowing, happy to show their finds prominently, and telling about them ; Sander about Catherina Knibbergen, lesser known than the others – but a member of the painters’ guild in The Hague – and a well-known landscape painter in her days (she travelled a lot with her brother); Paul about Lavinia Fontana, who worked at several prominent Italian courts, and the curious, both sweet and repulsive, little girl she painted… (read her story here in French).
Shown here : Michaelina Wautier (Mons 1617-1618 – 1689 Brussels), A Shepherd.
IMPRESSIONISTS
What else did I see? Too much to mention (see also the French section). A great Frans Hals. Lots of seascapes, landscapes, Van de Velde, Brueghel, Savery, Dutch impressionists (Haagse School), Isaac Israels in particular, whose work I’m very fond of… and secretly, I was quite happy that some works, that I admired last year, were still there…
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