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Le 11 juillet 1995, un drame immense s’est abattu sur Srebrenica, petite ville bosniaque assiégiée, puis envahie par les troupes serbes du général Ratko Mladić. Ce jour-là, plus de 8000 hommes et garçons, habitants de la ville, étaient froidement massacrés. Séparés de leurs familles, de leurs femmes et enfants, dont un grand nombre avaient pu trouver refuge auprès des casques bleus de l’ONU, d’ailleurs peu armés et sans mandat clair, qui n’ont pas pu (ou osé) empêcher que les hommes et les garçons soient emmenés vers un endroit isolé et exécutés sans autre forme de procès. Jusqu’à ce jour (2025), tous les corps n’ont toujours pas été retrouvés.
Cet acte a été reconnu comme crime contre l’humanité et même comme génocide par le Tribunal pénal International pour lex-Yougoslavie de La Haye.
/Le général Ratko Mladic agissait sous l’autorité et avec la complicité du président de la Serbie, Slobodan Milosevic et du Président de la république serbe de Bosnie, Radovan Karazic, qui d’ailleurs a collaboré étroitement avec Mladic, ont tous été jugés et condamnés à la prison à vie par le Tribunal spécial pour la Yougoslavie de La Haye.
La responsabilité des forces de l’ONU – ou plutôt leur passivité – a également été reconnue. Les quelques 400 casques bleus néerlandais qui occupaient ce poste n’avaient ni mandat clair, ni la capacité ou les armes nécessaires pour arrêter les troupes du général Mladic. Le gouvernement néerlandais a fini, en 2021, par présenter des excuses officielles lors de la commémoration de ce drame, qui a lieu tous les ans le 11 juillet.

Tous les ans, le 11 juillet, une commémoration se tient dans une commune limitrophe de Srebrenica, Potocari, là où sont enterrés les 8.372 hommes bosniaques massacrés, et où se trouve le mémorial. Depuis 2006, une autre commémoration – mobile, celle-là – a également lieu, à différents endroits dans le monde.

C’est une artiste bosniaque, la sculptrice Aida Šehović, qui en a pris l’initiative. Sous le titre « ŠTO TE NEMA » (« Où es-tu ? »), elle a créé un « monument mobile », ayant rassemblé des tasses à café que remplissent les spectateurs/participants – sans boire le café bien entendu, puisqu’il est destiné aux absents.. .
D’ailleurs, ce ne sont pas n’importe quelles tasses : ce sont des fildžani, ces tasses en porcelaine, sans anse, dans lesquelles les Bosniaques boivent leur café – ensemble, selon un rituel bien établi. Prendre le café, c’est un rituel collectif.
En 2006, lors de la première manifestation, à Srebrenica même, Aida Šehović et ses amies avaient réussi à réunir 923 tasses, toutes provenant de familles bosniaques. « On aurait pu les acheter neuves » , explique-t-elle lors du vernissage de presse à La Haye. « Mais cela n’aurait eu aucune signification. Il fallait qu’elles proviennent des familles concernées. »

Petit à petit, elle a rassemblé plus de 9ooo tasses, une pour chacune des 8.372 victimes du 11 juillet 1995, et un millier pour les autres victimes.
Depuis ce premier jour, ces cérémonies, ou séances du « monument mobile » ont eu lieu dans une quinzaine de villes à travers le monde : de New York à Istanboul, de Toronto à Genève… Cette année, à l’occasion du trentième anniversaire du massacre, des expositions se tiennent à différents endroits en Europe (en vrac: La Haye, Munich, Graz, Sarajevo…).
J’ai vu celle de La Haye (au KM21, annexe du Kunstmuseum), qui a été faite en collaboration avec l’architecte Arna Mačkić, spécialisée à la fois dans la présentation des expositions et les monuments « qui n’effacent pas le passé ». Le résultat est impressionnant.
Outre ces tasses (les premières 923), en équilibre sur des stèles qui rappellent des monuments funéraires, il y a les photos des victimes, ainsi que celles des familles. D’autres photos montrent les « monuments mobiles » de ces années passées. C’est sobre, et c’est émouvant, et plus que ça. Peut-être est-ce la sobriété, la simplicité même de cette exposition qui fait sentir toute l’horreur de ce crime contre l’humanité.

Et en même temps, on réalise – malheureusement – que ce massacre, ce génocide n’était point le dernier. Quand donc l’homme cessera-t-il d’être un loup pour l’homme?
Informations pratiques
Arna Mačkić & Aida Šehović – « Cups of Memory. A New Approach to Remembrance at KM21. » KM21, (annexe du Kunstmuseum), Stadhouderslaan 43 – 2517 HV Den Haag / La Haye. du mardi au dimanche, de 11.00 heures à 17.00 heures.
tél. + 31 (0)70 – 33 811 11 – info@km21.nl. Tickets et information : appuyez ici. Jusqu’au 16 Novembre 2025.
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English summary
Remember Srebrenica !

Remember July 11th, 1995 in Srebrenica (Bosnia)? That day, 8372 muslim men and boys were killed by the Serbian-Bosnian army, led by the infamous general Ratko Mladic.
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The men had tried to save their lives by entering the UN-enclave, but were turned away, unlike the women and girls, who did find a shelter there. To the discharge of the few hundred Dutch soldiers that manned the enclave, we can say that they were badly armed, had no clear mandate, and as a result were not up to Mladic’s army. Still, rightly or wrongly, the UN-forces in Bosnia, and in particular this UN-unit as well as the Dutch government were blamed for letting this massacre happen. A few years ago, the Dutch government made official apologies to the muslim population of Srebrenica.
Mladic, as well as other responsable men on the Serbian side – like Radovan Karadzic, the Serbian-Bosnian president, or Slobodan Milosevic, president of the Serbian republic – ended all up by being caught and convicted by theInternational Tribunal for the Former Yugoslavia, and they all got life sentences.
Each year, on the 11th of July, a commemoration is held in Potocari, on the outskirts of Srebrenica, where the men were buried in a mass grave.
For some 20 years now, another, movable ceremony takes place as well – sometimes here, then there, all over the world, from Chicago to Geneva, from New York to Istanbul. That is STO TE NEMA (« Where are you? »). During that ceremony, over 9000 fildžani or Bosnian coffee cups (given by the families, not new ones) are filled with coffee. One cup for each victim, the 8372 killed on the 11th of July and the others. No one drinks this coffee – the cups are for those who are gone.
It is an initiative of Aida Šehović, a Bosnian sculptor, who also works in the US. It took her years to assemble the 9000 cups. She started the first ceremony with only 923 cups – those same cups now on show in The Hague (Netherlands). This exhibition, which also comprises photos of the victims, and images of the earlier « STO TE NEMA ? » ceremonies, came about in collaboration with the Bosnian-Dutch architect Arna Mačkić. The 923 coffee cups are shown on as many steles – and as such, they remind us of the tombstones on war graves. Very impressive.
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What happened in Srebrenica
Practical information
Arna Mačkić & Aida Šehović – « Cups of Memory. A New Approach to Remembrance at KM21. » KM21, (annex of the Kunstmuseum), Stadhouderslaan 43 – 2517 HV Den Haag / The Hague. Tuesdays through Sundays, 11.00 am to 5 pm.
tel. + 31 (0)70 – 33 811 11 – info@km21.nl. Tickets and information : click here. Until 16 November 2025.
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