La fabuleuse destinée d’Anna Boch

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Issue de la bonne bourgeoisie – mais la bourgeoisie progressiste, non-conformiste, et artistique – Anna Boch pouvait « se permettre » de se payer de bons maîtres – car les formations artistiques formelles, telles les Écoles des Beaux-Arts, étaient encore fermées aux femmes, en Belgique comme ailleurs. Mais toute sa vie, elle a continué à s’instruire, à parfaire son art, jusqu’à un âge très avancée.


(Ci-contre : Anna Boch, Femme écrivant, 1888. Coll. part.)

Bien qu’elle ait peint quelques intérieurs et quelques portraits, elle aimait surtout travailler en plein air. Lorsqu’elle mettait en scène des personnages, elle avait une prédilection pour les gens humbles, les paysans – et les paysannes ! -, les pêcheurs – et leurs femmes, ou veuves – et des activités qui avaient un rapport avec la terre ou bien la mer.

(Ci-contre : Anna Boch, Femme rentrant de la pêche, 1891. Esquisse d’une toile perdue.)

Anna Boch, La promenade du dimanche. 1906-1908.

Anna et Eugène ont fait plusieurs séjours en Bretagne. Du côté de Quimper d’abord (Bénodet), où elle peint et repeint la côte, le paysage, les chaumières… Plus tard, avec leur chauffeur Albert Lepreux – qui se met à la peinture, lui aussi – ils sillonnent le centre et le nord, Morlaix, Perros-Guirec…, Maintes fois, elle a peint les côtes bretonnes, toujours à la recherche de cette « sacrée lumière »…

(Ci-contre : Anna Boch, Côte de Bretagne. 1901-1902. Coll. Arets Galeries.)

Anna a peint aussi la Méditerranée, ses falaises, les pins parasol, les bateaux sur la plage. Et elle a peint les dunes du nord, les maisons qui s’y cachent.

(Ci-contre: Anna Boch, Les falaises de l’Estérel, 1910. Coll. part.)

Comme je l’ai écrit plus haut, Anna Boch était un peintre de talent doublée d’une musicienne tout aussi douée. Elle jouait de l’orgue, du piano et du violon. Mais elle a organisé pas mal de concerts – très prisés du public et de la presse belge – où elle ne jouait pas, elle, et où, au contraire, elle invitait d’autres musiciens, souvent célèbres. Parmi ses hôtes de marque, Gabriel Fauré, très heureux de la façon dont on avait joué son Requiem lors d’une de ses soirées. Dans une lettre à sa femme, il écrivit : « On s’y baignait, tant c’était intime et parfait comme exécution. Ça m’a ému moi-même. […] Maison admirablement organisée pour la musique, avec un grand orgue, le public le plus attentif et le plus enthousiaste. »
La maison en question était La Closerie, la maison familiale à La Louvière, dite Le Château. Anna Boch a organisé aussi des concerts dans d’autres maisons qu’elle a habitées, à Bruxelles ou dans les environs – car elle changeait de maison comme de robe. Qu’importe, la musique lui était aussi indispensable que la peinture.
(Ci-contre : Une répétition de l’opéra Caligula, de Gabriel Fauré, sous la direction de Vincent d’Indy, chez les Boch.)

Comment définir le style d’Anna Boch ? Impressionniste ? Post-impressionniste ? Pointilliste ? Il ne fait nu doute qu’elle ait été influcencée par l’oeuvre de Georges Seurat et celle de Paul Signac, dont elle a très tôt acquis quelques toiles. Mais très vite, elle a retrouvé un style tout à fait personnel – au point que des « puristes » du pointillisme ont pu lui reprocher de ne pas respecter la « doctrine ».

Bien qu’elle n’ait pas eu besoin de vivre de son art, Anna agissait en peintre professionnel. Très vite, elle a exposé – et même vendu – ses tableaux, très vite aussi elle a adhéré à des groupements d’artistes, comme les XX, groupe de peintres impresssionnistes de Bruxelles. Mais elle a exposé ses tableaux également à Paris, notamment au Salon des Indépendants et là aussi, ses oeuvres trouvaient preneur.

(Ci-contre : Anna Boch, Chapelle dans les montagnes de Port-Cros, 1930. Aquarelle, crayon et gouache sur papier, dans un de ses carnets de voyage.)

Anna et Eugène Boch avec la Mercure d’Anna, conduite par André Lepreux. Sur la banquette arrière, Laure Van Haelewijn, la gouvernante d’Anna, qui était la marraine d’Ida, la fille de Laure, Anna a peint Ida plusieurs fois, entre autres dans « Sous la pergola…».

Anna Boch tenait farouchement à son indépendance, et elle n’a jamais voulu se marier. Mais elle n’etait pas pour autant une solitaire, loin de là. Pour commencer, elle est « vingtiste », c’est-à-dire qu’elle adhère au Groupe des XX, qui en 1893 se transformera en La Libre Esthétique, plus ouvert aux arts décoratifs. Là, elle exposera aussi ses peintures sur porcelaine. Plus tard, elle joint encore un autre cercle d’artistes, Vie et Lumière, qui expose également à La Libre Esthétique.

(Ci-contre : Anna Boch, Paysage avec barques, s.d., coll. privée.)

Anna avait égelement de solides amitiés, avec des hommes comme avec des femmes. Une de ses amies les plus proches était Marie Derscheid, amie de jeunesse dont Anna est restée proche toute sa vie. Docteur en médecine, Marie – bien que mariée – était une femme indépendante (ce qui à l’époque n’était pas évident), qui accompagnait souvent son amie pendant ses voyages. Inspirée par Anna, Marie s’est mise aussi à l’aquarelle (en amateur).

(Ci-contre : Anna Boch, Port-Cros, lever de soleil. 1930. Carnet 7, Aquarelle + pastel sur papier.)

Anna était-elle en contact avec des femmes peintres françaises (ou travaillant en France), comme Berthe Morisot ou Mary Cassatt ? Rien ne l’indique, mais vraisemblablement, elles se connaisssaient de nom, puisque Anna a exposé aussi à Paris, notamment au Salon des artistes indépendants et à la Galerie Druet. En 1906, elle a participé avec quatre toiles à l’Exposition des femmes artistes au Cercle artistique et littéraire à Bruxelles.
Par ailleurs, elle fréquentait des musiciennes. Connaissait-elle Lili et Nadia Boulanger, fidèles du festival de Bayreut comme Anna, et comme elle, amies et émules de Gabriel Fauré ? Je n’en sais rien, mais j’aime le penser. En tout cas, ce qui les lie, c’est le Requiem de Fauré, donné en concert à La Closerie, la maison familiale des Boch. Ce même Requiem que dirigeait Nadia Boulanger à Londres quelques décennies plus tard…
(Ci-contre : Anna Boch, Au jardin, 1908. Bruxelles, Famille Blondel.)

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English summary

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Anna Boch’s fabulous destiny

The Boch family was well off, even rich. But they were also non-conformistic, even progressive, very different from the « typical » catholic and conformistic family that is supposed to symbolise the 19th century Belgian bourgeoisie. The Bochs, who owned, and ran the china factory Boch Frères (now Villeroy & Boch), were great art and music lovers. Anna’s brother Eugène was a painter too, and their younger sister Lily and father Victor were enthousiastic and talented amateur painters. So the family didn’t object at all to Anna’s decision to remain unmarried, and even less to her choice for an art career. They were all good musicians, and often played with friends in their studios. Anna also organised concerts in their family home La Closerie, and later in her own house, which were very popular, both with the best musicians of the time, and the public (as well as the critics). The French composer Gabriel Fauré, whose Requiem was performed at Anna’s place, was one of their close friends.

(Shown here: Anna Boch, The Fish Net Menders in the Dunes, 1895-1905. Private Collection.)

Anna Boch was also a collector and maecenas. She bought art works by, among others, James Ensor, Paul Signac, Georges Seurat, Jan Toorop, Maurice Denis, and it was Anna again who bought the only canvas sold by Vincent Van Gogh during his lifetime (The Red Vinyard at Montmajour). Anna’s brother Eugène (whose portrait Van Gogh painted) befriended him when they both lived in Paris, and convinced him to show his work in Brussels at the Salon where the Bochs both showed their work.
Eugène didn’t do much to promote his own work, but Anna’s sold quite well; she was sucessful both in Belgium and in France, where she spent much time, both in the South and in her beloved Brittany. She travelled all over Europe and even in North Africa, always with her sketch books – but she always returned to the coast and countryside in the Low Countries.
(Shown here: Anna Boch, Lively landscape in Veere, 1906. Private collection.)

Practical information

Clockwise from top left: Alice Frey,The Undecided, 1927; Rik Wouters, Woman in White, 1915; Constant Permeke, The Cabriolet, 1926; Jean Brusselmans, Carnavel, 1952; Room view, with one of James Ensor’s seascapes in the back (photo Jacqueline Wesselius).


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