«Une juge a fait écouter un journaliste du Monde».
Un des titres du quotidien d’aujourd’hui. Bien sûr, on sait que cela arrive, après les affaires des «fadettes» d’il y a quelque temps et en pleine affaire NSA-Snowdon-Wikileaks-Manning.
N’empêche que je suis choquée, époustouflée. 490 conversations téléphoniques enregistrées, dont nulle en rapport avec l’affaire instruite – et pour cause: ladite affaire est close depuis trois ans. En revanche, la police a écouté des conversations entre le journaliste, Gérard Davet, et sa femme (avocate!), ses enfants, le plombier… Bref, tout, tout, tout pendant un mois – dont aussi, bien sûr, des conversations ayant trait à d’autres articles que ce journaliste d’investigation préparait.
Bon, le pot aux roses à été découvert, la juge – déjà mise en cause dans une autre affaire – aura à répondre de ses actes et, espérons-le, les policiers concernés également. N’empêche: il a fallu quatre ans pour que l’une des avocates du Monde, plus ou moins par hasard, découvre les faits. Et pendant tout ce temps, ceux qui devraient être «sans blâme et sans reproche» ont pu se donner à coeur joie.
Moi qui suis vieille comme le monde (et plus vieille que Le Monde), je me souviens d’une époque où nous souffrions tous – journalistes ou non – d’«espionnite» dès que nous approchions un téléphone. C’était le temps des barbouzes, des micros cachés (notamment dans les bureaux du Canard Enchaîné), bref de l’Etat policier/espion dans toute sa splendeur.
Malheureusement, ce temps ne semble pas entièrement révolu – ou alors il est en train de revenir au galop, grâce aux techniques modernes – et nous, nous agissons en conséquence. Nous devenos prudents, ultraprudents même, à la limite de la paranoia. Bientôt, nous allons tous être atteints d’espionnite. Quitte à éviter les moyens de communication électroniques, pour nous parler de visu, loin de toute oreille, humaine ou autre, dans un jardin public, un lieu isolé… Comme au bon vieux temps de John Le Carré et des espions venant du froid…