Donc, il a gagné. Il pavoise, il exulte, il en bafouille. Son parti, dit-il dans son excitation, est devenu ‘presque deuxier’. Je parle de Geert Wilders-le-populiste, vous aviez compris. Et ‘tout le monde’ – du moins mon entourage – de se réveiller avec une gueule de bois. Effacés, l’espoir et l’optimisme inspirés par le discours d’Obama au Caire!
Pourtant, c’était prévisible. Les sondages l’avaient même prédit. Mais ils avaient prédit aussi une participation encore plus faible que les autres années – et le monde qu’il y avait dans mon bureau de vote (et dans quelques autres) semblait contredire ces prévisions. Je pensais, j’espérais que mes compatriotes s’étaient resaisis et qu’ils étaient venus voter en masse pour faire barrage à ces vues simplistes et dangereuses. Pour les empêcher d’entrer au Parlement européen. Quand même, on ne peut pas se permettre d’être la risée de l’Europe! Et nous, qui montrions du doigt la France, la Belgiqu, quand les Le Pen et les Dewinter se faisaient élire là-bas, avec des scores incroyables. ‘Ha!’ disions-nous, ‘chez nous, ce serait impossible, voyons…’
Eh bien non. Mon bureau de vote n’est pas représentatif, mon quartier non plus. Soixante pour cent du corps électoral n’a pas voté – et parmi ces indifférents, même des gens qui devraient savoir mieux, même des confrères/consoeurs journalistes, que je supposeraisplus informés, plus concernés que ça. ‘Oui, c’est mal de ne pas avoir voté’, disent-ils. Et c’est tout.
Qu’il y ait – toujours – bon nombre d’électeurs qui votent avec leurs tripes et non avec leur cerveau, soit. Il y a – combien? – une trentaine d’années, Françoise Gaspard, alors maire de Dreux, me le disait déjà: ‘A ceux qui font campagne à force de slogans, on ne peut qu’opposer la réalité. Mais elle est forcément moins palpitante et plus longue à expliquer, elle ne se résume pas en une phrase-clef!
Tout cela, je le savais. Mais qu’il y ait tant de gens – encore une fois, même des gens intelligents, des gens que j’estime – qui simplement ne se sont pas dérangés… cela me dépasse. Et cela me met en colère.
Bien sûr, l’Europe n’est pas parfaite, loin de là. Et bien sûr, les partis politiques ne le sont pas non plus, c’est encore plus évident. Et la démocratie… Winston Churchill le disait déjà, c’est le système le plus mauvais à l’exclusion de tous les autres. Et justement, la démocratie, elle, elle en prend un coup par des comportements pareils.
Alors, mes amis français, belges, italiens, tous ceux qui n’avez pas encore voté, je vous en conjure: allez voter! Montrez à mes compatriotes à quel point ils ont été bêtes, noyez ces quelques votes ‘de travers’ dans une mer de votes ‘justes’ (et montrez-le par la même occasion aux Britanniques, car j’ai bien peur que chez eux, un phénomène similaire se soit produit, on le verra quand on comptera les votes). Pathétique, mon appel? Oui, sans doute, et alors? Rira bien qui rira le dernier…