Une fois de plus, j’ai entendu la nouvelle au réveil. Alan Johnston libéré – non mais, je rêve encore, ou quoi? Eh bien non. Super! D’un coup, j’étais bien réveillée, et j’ai tout suivi: les paroles de Graham et Margaret Johnston, les parents d’Alan – Graham surtout, Margaret n’arrivait pas à en placer une. Fous de joie, qu’ils étaient. Les collègues qui, quand ils ont eu vent de la nouvelle et avant de pouvoir en faire part au reste du monde, devait en attendre la confirmation par la direction de la Beeb – et d’après ce que j’ai compris, ça prenait du temps… Et quand ils ont ont appris que oui, c’était vraiment vrai, ils ont voulu fêter ça, mais il fallait se mettre au boulot dare dare, diffuser la nouvelle pour que tout le monde sache…
Le reste de la journée, je l’ai passée quasiment l’oreille collée à la BBC World Service – celle-là même que Johnston pouvait écouter pendant sa captivité et qui lui donnait, comme il disait, une petite fenêtre sur le monde. Du coup, même s’il désespérait, il savait qu’on ne l’oubliait pas, loin de là. Tous les jours, la World Service donnait la parole à l’un de ses collègues, qui s’adressait le plus souvent directement à lui. Plus d’une fois, je trouvais ces messages émouvants; entendre un de des camarades lui dire: »Alan, si tu peux m’entendre, sache que… » En même temps je me disais que leur espoir était vain, qu’il ne pouvait pas les entendre du tout. Et pourtant, si! La radio, c’est quelque chose de formidable.
Formidable aussi, le soutien qui s’est créé. 200.000 personnes de par le monde ont signé la pétition. En même temps, on se dit, un peu amèrement, qu’il y en a qui n’ont pas bénéficié d’un tel soutien. Parce qu’ils n’avaient pas derrière eux un appareil puissant comme la BBC , parce qu’ils n’étaient pas connus dans le monde dit « occidental » et (pour parler avec Aragon/Ferré) « parce qu’à prononcer leurs noms sont difficiles »…
114 jours, ce n’est tout de même pas rien. Surtout quand on n’a pas la moindre idée de ce qui va vous arriver. Comme le racontait Johnston après sa libération, ses ravisseurs auraient tout aussi bien pu le tuer… Effectivement, la prise de pouvoir de Hamas les a rendus nerveux, pendant un moment ils étaient sûrement capables de tout…
Enfin – tout est bien qui finit bien, comme dit le proverbe. Soulignons au passage que c’est un beau coup de pub pour Hamas aussi. Il faut dire que là, ils l’ont mérité. Reste à savoir s’ils vont maintenir leur nouveau style – nous c’est du sérieux, nous on sait maintienir l’ordre, on est des gens de bien – et quelles en seront les conséquences…
Le journaliste Alan Johnston libéré à Gaza grâce aux pressions du Hamas
LE MONDE | 04.07.07